Du 4-2-4 au 2-3-5 : Le Bayern explose Porto

Après un match aller plombé par une entame totalement ratée, les Bavarois ont violement remis les pendules à l’heure au retour. Incapable de faire le nombre face à la défense portugaise à l’aller, Guardiola a quasiment aligné 5 attaquants pour faire voler en éclat l’équipe de Lopetegui en une mi-temps.

Thiago Alcantara plonge entre Maicon et Casemiro, et déclenche l'avalanche de buts bavaroise

Thiago Alcantara plonge entre Maicon et Casemiro, et déclenche l’avalanche de buts bavaroise

Pressing : le 433 persécuté 

Face au 433 de Porto, le Bayern a pressé avec beaucoup plus d’agressivité et d’ambition offensive qu’au match aller. Dès que le ballon était perdu par les Bavarois, le Bayern s’organisait dans un 4231 calqué sur le 433 de Porto, ne laissant aucun répit au porteur du ballon.

Lors du match aller, 2 milieux de terrain à pointe basse (en 1-2) se faisaient face : Xabi Alonso, Boateng et Dante étaient quasiment à 3 sur le seul Jackson Martinez, alors que de l’autre côté du terrain Götze (10) se chargeait du marquage de Casemiro (pointe basse) et que les attaquants chargeaient (en retard) les latéraux de Porto.

le plan défensif relativement conservateur des Bavarois à l’aller : 3 attaquants face à 5 relanceurs Portistes, et la charnière + Xabi Alonso sur Jackson

Le plan défensif relativement conservateur des Bavarois à l’aller : 3 attaquants face à 5 relanceurs Portistes, et la charnière + Xabi Alonso sur Jackson

Mercredi, Guardiola a proposé un plan beaucoup plus cohérent et agressif. Dans une sorte de 4-2-4, les marquages étaient partagés comme suit, avec une agressivité maximale, sur tout le terrain :

  • Muller et Lewandowski se partageaient les 2 centraux et le 6 Casemiro
  • Xabi et Thiago se sont chargé du duo de relayeurs (Oliver et Herrera).
  • Sur les côtés : les paire [Bernat – Götze] et [Rafinha – Lahm] ont traqués les ailiers et les latéraux de Porto sur tout le terrain.
  • Derrière, Jackson était géré par Boateng et Badstuber, dans une ligne beaucoup plus haute qu’à l’aller.
La représentation – à peine schématique – du pressing bavarois.

La représentation – à peine schématique – du pressing bavarois.

Privé de ses habituels latéraux (Alex Sandro et Danilo), Lopetegui a fait commencer des centraux de métier à leurs postes (Martins et Reyes). Plutôt que de rendre le FCP plus solide, ce choix (forcé) n’a fait qu’accentuer la dictature territoriale du Bayern, qui a vite réglé l’affaire grâce à une animation offensive explosive.

Si l’une des chaines de ce pressing avait lâché, les Portistes auraient pu aller défier la défense du Bayern grâce à l’égalité numérique. Mais mis sous une terrible pression dès l’entame, les talents offensifs de Porto n’ont jamais été à la hauteur dans le 1 contre 1 ou la justesse technique pour contrarier le plan de Guardiola.

Attaque : Intervalles et Intervalles

Grande faille de l’aller, l’utilisation du ballon par les centraux (Badstuber remplaçait Dante) était la première correction apportée par Guardiola. A la base des mouvements, les 2 stoppeurs allemands ont utilisé au maximum l’espace qui leur était octroyé par le marquage exclusif de Jackson sur Xabi Alonso.

Sans compter Casemiro, qui s’est vite comporté comme un cinquième défenseur, la ligne des 4 milieux portistes offrait 5 intervalles. Dans chacun d’eux se trouvait un joueur offensif du Bayern :

  • Lahm entre Brahimi et la ligne de touche
  • Muller entre Brahimi et Oliver
  • Lewandowski entre Oliver et Herrera
  • Thiago entre Herrera et Quaresma
  • Götze entre la ligne de touche et Quaresma
Thiago Alcantara se joint à une ligne d'attaque déjà fournie, et le Bayern occupe chaque espace entre les milieux Portista

Thiago Alcantara se joint à une ligne d’attaque déjà fournie, et le Bayern occupe chaque espace entre les milieux Portista

Si les actions commençaient dans une sorte de 4-2-4, avec un cœur du jeu Thiago – Xabi Alonso, le (jeune) espagnol – après avoir décroché pour faciliter la sortie de balle – se joignait à une attaque déjà composée de 4 éléments pour occuper chaque « carré » du bloc de Lopetegui. Ainsi, le Bayern a écarté le bloc de Porto ; non pas par la fixation et le jeu court ; mais par l’occupation de la largeur et les passes dans les intervalles – ou longues en diagonales – de ses défenseurs centraux.

Les longues diagonales ont été multipliées par Boateng et Badstuber vers Lahm et Götze, en plus des passes verticales pour Thiago, Müller et Lewandowski. Cette présence offensive massive a eu pour effet de faire reculer le bloc de Lopetegui, offrant toujours plus de liberté au « défenseurs-meneurs de jeu » de Guardiola.

Une fois les Portugais forcés au repli par cette ligne de 5 attaquants, Bernat et Rafinha venaient se positionner comme des « 8 », derrière cette ligne, autour de Xabi Alonso. Le Bayern se transformait d’un 4-1-1-4 en une sorte de 2-3-5. Avec ces deux joueurs pour jouer les seconds ballons offerts par les diagos de Bastuber et Boateng, Porto a totalement étouffé.

Les Bavarois mettront quelques minutes à réussir cette première étape et à joindre correctement Lahm et Götze. A ce moment-là, il s’agissait pour les 4 autres joueurs offensifs, d’utiliser les intervalles entres les défenseurs, pour créer le danger à la réception des centres.

début :

début : 4-2-4
fin : Intervalles entre les défenseurs

Martins et Reyes ont semblé totalement perdu face à l’attitude offensive de Lahm et Götze. Attirés vers les côtés par ces 2 ailiers-surprise, ils ont agrandi l’espace qui les séparait de leur centraux. Espaces dans lesquels se sont engouffrés avec succès les Bavarois, posant les bases d’une boucherie d’une rare intensité.

La 3e voie

Depuis son arrivée en Bavière, la direction technique de Pep Guardiola est souvent résumée à une simple importation des préceptes du jeu de position barcelonais en terre barbare. En réalité, la vision du technicien espagnol est bien plus riche. Si le Guardiola de Barcelone s’opposait dogmatiquement et d’une façon assez binaire au football de contre-attaque de l’école desdits bétonneurs, le Pep de Bavière est un entraineur différent. Conscient des profils qui s’offraient à lui (plus de taille devant notamment), il a mis en place un projet de jeu qui tend plus à appartenir à « la 3e voie ». Celle de Bielsa, celle de Van Gaal.

Plus de percussion, plus de centres et plus de verticalité. Moins de défense de zone, plus de marquage individuel. Depuis son arrivée à Munich – exceptée la rouste infligée à City l’an dernier en pur 4-3-3 – son Bayern a réalisé ses 3 meilleurs performances avec 2 attaquants : en 352 contre la Roma (7-1), en 424 contre le Werder l’an dernier (7-0) et en 424 (voire même 235) contre Porto lors du retour.

La possession, toujours. Mais plus de jeu long, et plus de centres.

La possession, toujours. Mais plus de jeu long, et plus de centres.

Une évolution dont nous faisait part Martí Perarnau dans, qui a suivi l’entraineur Catalan pendant la première année de son mandant (Pep Confidential, Arena Sports). Extraits :

Perarnau : « L’idée directrice de Pep Guardiola au Barça a toujours été la supériorité numérique au milieu. Pourrait-il reproduire ça au Bayern ? En réalité, non. Il explique qu’il veut toujours cette supériorité au cœur du jeu, mais qu’il veut aller plus loin en redoublant les efforts de l’équipe sur les ailes. »

Guardiola : « Nous convertirons chaque attaque en une situation de 1 contre 1 (…) Nous devons continuer à être supérieurs au milieu, mais également solliciter nos ailiers avec des passes diagonales pour faire reculer le bloc adverse. (…) Nous avons de très bons centreurs et des finisseurs de top-niveau. (…) Si nous avons le ballon sur le côté, vous verrez 2 renards des surfaces arriver. La chose à faire est de leur donner le ballon. »

Victor

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6 réponses à “Du 4-2-4 au 2-3-5 : Le Bayern explose Porto

  1. Tu es resté soft quant au fond musical… même si mettre du Lana del rey, c’est couillu.
    Merci pour cette vidéo, encore du très bon taf’! J’espère retrouver cette même magie lors de la double confrontation contre Barcelone, ce pourrait même être 2 des plus beaux matches de l’année voire de la décennie si les 2 équipes sont au top. Cela dit, la nervosité de Pep est un peu inquiétante, il en devient limite chelou n’empêche…
    Tu préconises un 3-5-1-1 pour la demi de C1: dois-je en conclure, et c’est ce qui transparait de la fin de ton article, que c’est sur les côtés que se jouera cette demi?

  2. Excellentes vidéos et analyse générale! J’apprends beaucoup grâce a toi! Ce qui m’avait le plus choqué lors de ce match c’est la quantité de « passes lasers » de boateng durant ce match qui amenaient un danger instantané! Le joueur s’est métamorphosé depuis son aller catastrophique, il faut aussi saluer le travail mental sur le défenseur du manager.

    Après je poserai deux questions : n’y-avait-il pas deux solutions éventuelles pour empêcher ce plan de marcher : 1) jouer et risquer le bloc haut pour aller chercher boateng/xabi directement? En sachant que tactiquement julen a plus un résultat a conserver qu’une victoire a aller chercher et surtout que sans ses latéraux il n’y a plus de vitesse derrière si ca part et que l’alignement va etre difficile avec des joueurs qui ne jouent pas souvent…

    2) Autre solution : un bloc médian ultra-compact a la athlético madrid avec un quadrillage ultra serré sur les côtés (prises a deux etc…), des surnombres, pour empêcher lahm/bernat/gotze/ rafinha de distribuer les centres? Mais ce n’est pas dans les habitudes de Porto…

    Voila mon opinion merci encore Victor!

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  5. Superbe vidéo, du beau travail..!

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